Acte I — exposition : 4 minutes chrono.
La présentation des personnages est très rapide.
Casey (Anya Taylor-Joy) est seule parmi les autres filles de son âge. On voit tout de suite qu’elle est différente, ignorée et écartée de la société. Puis, c’est au tour de Claire (Haley Lu Richardson), son opposée. Elle est réputée, car elle invite tous les élèves de son cours à sa fête d’anniversaire et l’on voit que tout le monde est venu. On aperçoit également qu’elle sort du stéréotype de la star du lycée méprisante, car elle éprouve de la compassion en faisant l’effort de l’inviter. On imagine, grâce à son père, que c’est dû à son éducation.
« *[…] je ne peux pas inviter toute ma classe d’arts excepté une personne sans que les preuves sur les réseaux sociaux causent plus de mal à cette personne. Et, je ne suis pas un monstre.* »
S’en suit un dialogue mettant en avant des troubles psychologiques chez Casey (selon des rumeurs). Son attitude appuie ces rumeurs. Le père de Claire ajoute une phrase annonciatrice pas forcément nécessaire et qui révèle un bout de la suite imminente.
« *[…] donc ça sera une des dernières occasions que j’aurai de vous raccompagner.* »
Marcia (Jessica Sula) ne tient pas une place importante et semble être une pâle copie de Claire, sa meilleure amie. C'est au tour de Dennis (James McAvoy) d'entrer en scène. Il se faufile dans la voiture, il est calme et déjà étrange à cause de son trouble obsessionnel compulsif (T.O.C.). En effet, il nettoie le tableau de bord avant même de s’en prendre aux filles.
On se doute très vite de l'enlèvement et nous sommes très vite fixés. Dans cette scène, Casey garde étonnamment son calme. D'ailleurs, Dennis ne l'agresse pas tout de suite contrairement aux deux autres, ce qui marque encore la différence. On peut imaginer qu'elle est habituée à ce genre de situation.
En bref, cet Acte I de quatre minutes pose les bases : on a identifié les deux personnages principaux (Casey et Dennis) ainsi que leur comportement. On sait que les filles se font enlever par un homme ayant des problèmes émotionnels.
Acte II — Tranquillement
Une fois la thèse de l'enlèvement confirmée, l'histoire doit éclaircir les troubles de Dennis. Et quel meilleur choix qu'une psychologue pour nous l'expliquer ? Le Dr Fletcher fait son apparition et va tout nous dire à propos de Barry de la plus simple des manières : en l’énonçant lors de plusieurs séances.
On apprend donc :
– que son vrai nom est Kevin et que son évocation occasionne le chaos chez eux ;
– qu'il a des troubles dissociatif de la personnalité (T.D.I.) et qu'il a vingt-trois personnalités différentes ainsi qu'une vingt-quatrième non-humaine ;
– que c'est dû à des traumatismes sexuels pendant l'enfance ;
– que son père l'a abandonné en partant en train ;
– que sa mère lui donnait des punitions violentes ;
– qu'il avait une situation stable, mais que cela a changé à cause d'un récent traumatisme dû à deux jeunes filles qui l'ont forcé à mettre sa main sous leur chandail ;
– que personne dans la communauté scientifique ne croit au T.D.I. (du moins à cette période) ;
– que deux des personnalités (Patricia et Dennis) ont été bannies, car ils avaient des croyances controversées (La Bête) et des comportements dangereux (voir de jeunes filles danser nues) ;
– que Patricia et Dennis sont ridiculisés par les autres, car ils croient en La Bête ;
– que La Bête est dans la gare de triage ;
Rien que ça ! D'où l'importance du personnage du Dr Fletcher. D'autres dialogues montrent qu'elle pense qu'ils sont supérieurs aux humains ordinaires, qu'ils peuvent utiliser toutes les capacités de leur cerveau. Et c'est dans une scène plutôt comique et ressemblant à Requiem For A Dream que la nuance est forte entre ceux passant la journée devant leur télé et ceux atteints de T.D.I.
Il est souvent souligné la supériorité, voire le surnaturel, de Barry et de toutes les personnes atteintes de troubles dissociatifs de l’identité, un chemin qui nous mènera vers le monde des Super-héros de comics. Car, il faut le souligner même si cela paraît évident, un humain qui se prend pour un Super-héros n’est pas capable de résister aux balles d’une arme surtout s’il est persuadé qu’il le peut.
De l'autre côté, nous avons Casey, elle aussi atteinte d'un traumatisme psychologique que l'auteur nous illustrera avec des flash-back. Ils sont tout d'abord d'une ambiance chaleureuse (les couleurs sont chaudes contrairement aux restes du film très sombre). Ce qui nous autorise des pauses dans la montée en intensité. On pense que les capacités de chasse qu'a enseignées le père de Casey lui permettront de se sortir de cette situation. Tout compte fait, non.
Malheureusement, on ne connaîtra pas la vraie fin de son histoire puisque la policière indique que son oncle est venu la chercher. On voit dans son regard la détresse, mais est-ce que l’agent des forces de l’ordre a compris ? Mystère !
Mystère également des cicatrices sur son corps : est-ce de la mutilation ? Est-ce dû à son oncle ? Peu importe, ses marques lui permettent d'avoir la vie sauve, car La Bête ne s'attaque qu'aux âmes impures c'est-à-dire celle qui n'ont pas vécu de traumatisme.
« Ce n'est qu'à travers la douleur que l'on peut devenir supérieur. »
Il y a quand même, dans ce film, quelques résolutions presque sorties du chapeau.
Comme au moment où Casey arrive à s’échapper de sa chambre. Elle trouve un clou par terre alors que Dennis semble maniaque de la propreté. Elle réussit à ouvrir la porte et, plutôt que de chercher à s'enfuir, elle regarde les vidéos « journal intime du lundi » de toutes les personnalités et c'est grâce à une en particulier qu'elle déniche les clés pour sortir.
Elle trouve ensuite un moyen de calmer La Bête en disant le nom de Kevin Wendall Crumb, technique qui avait été préparé ultérieurement lors... d'une séance chez sa psychologue. Là, on est informé qu'un fusil se cache dans la pièce. Coup de chance pour une fille ayant appris à chasser des bêtes. Mais finalement, elle ne le touchera qu'à bout portant et sans effet. Ce qui réduit à néant tous les flash-back qui n'auront servi qu'à définir son traumatisme.
La Bête arrête de la pourchasser en voyant ses cicatrices. C'est la seule des trois amies à garder tous ses vêtements. Aussi on apprend que Dennis suivait deux filles au lieu de trois. Il aurait pu se méfier de la troisième en pensant qu'elle est différente, mais il ne doute pas une seconde alors qu'on sait pertinemment qu'il ne recherche que des filles impures.
En fin de compte, les informations données le sont quasiment toutes par des dialogues : chez la psychologue ; entre Casey et Hedwig ; en conférence sur Skype. Ce qui en fait un scénario très verbeux. On s'attend bien évidemment à ce que Casey survive notamment, car elle est la seule à avoir un instinct de chasseur et qu'elles se battent contre une bête. L'arrivée de La Bête est longue et l'on est en droit de s’interroger pourquoi elle n'apparaît qu'à cette soirée en particulier plutôt qu'aux autres. On se demande aussi pourquoi vingt-quatre personnalités différentes sont évoquées alors que l'on en voit cinq seulement. Dennis et Patricia contrôlent le mauvais côté, mais Patricia est quasiment inexistante.
Acte III — La suite
Un dernier acte court, tout comme le premier, et qui annonce, par le dialogue encore, une suite dans un univers déjà mis en place par un précédent film du même auteur : Incassable (2000). La Bête finit par s'en sortir et prépare une suite dans la continuité de ce qu'elle est capable de faire. Casey retourne à sa vie d'avant, tuteuré par son oncle qui abuse d'elle.
Mot de la fin
Le film entre rapidement dans le vif du sujet. On ne s'étend que très peu sur la vie des trois filles. Si l'auteur parle en particulier de celle de Casey, c'est dans le but d'expliquer sa survie. Kevin/Dennis/Barry... est le protagoniste et son histoire est essentiellement mise à plat par des dialogues entre lui et le Dr Fletcher. Elle évoque une situation stable qui dégénère à cause d'un élément déclencheur. L'auteur amène longuement l'arrivée de La Bête pour la résolution d'un climax préparé, mais qui reste facile.